A lire et à partager

Précommandez Wallonie française ! qui va détonner dans le ciel belgicain.

Par Louis NISSE

Chères amies, chers amis réunionistes,

Préfacé par notre vice-Premier ministre au fédéral, mon essai – Wallonie française ! – va paraître aux éditions Mols de Wavre, le 7 mars prochain. J’y présente la Wallonie à un Français censé ne rien savoir ni de ce que nous sommes, nous les Wallons, ni de la question belge actuelle. Mon approche est pluridisciplinaire : historique, linguistique, culturelle, politique, sociologique. Souvent je mêle Histoire et petite histoire, ce qui rend la lecture agréable : « Quel plaisir de vous lire ! », m’ont dit et m’ont écrit plusieurs premiers lecteurs à qui j’avais soumis mon manuscrit. Beaucoup se sont réjouis que je donne de la Wallonie une image positive, nuancée et libérée des poncifs coutumiers.

La réunion de la Wallonie à la France est donc un grand thème de mon essai. En juin, ce sont les élections. La question de la réunion à la France va se poser et, dans la belle préface dont il m’a gratifié, le vice-Premier ministre Pierre-Yves Dermagne affirme qu’il veillera à ce qu’il y ait débat, qu’on ne puisse pas balayer cette question sous le tapis. Avec un plan F, nous n’irions pas tout nus aux négociations avec les nationalistes flamands. Puisse mon livre contribuer à rendre aux Wallons de la confiance et une juste fierté !

L’autre thème de mon livre est la défense de la francophonie, en péril face à l’anglais qui évince les autres langues et les autres cultures avec la complicité d’une Union européenne vassalisée. Nous risquons la mort culturelle. J’incite le lecteur à la lutte, dans l’honneur. Wallonie française ! sera bien distribué, en Wallonie et en France. Passez déjà commande auprès de votre libraire préféré.

Haut les cœurs !

Il l’a dit

Fabrice Luchini est à l’affiche de « La petite », un mélodrame où, contrairement à son habitude, il parle peu… mais exprime beaucoup. « C’est émouvant », peut-on lire dans Le Soir du 20 septembre 2023, en présentation d’une interview de l’acteur, dont nous reproduisons ici un passage :

– Il est intéressant de vous voir, ainsi que le personnage, être confrontés à une langue que vous ne maîtrisez pas, le flamand. Dans  » La petite », vous n’avez pas l’arme des mots…et c’est jouissif !

– Tant mieux, ça me fait plaisir parce que je me suis dit : ça passe ou ça casse. Je connais le dossier belge ! Parlons de la supériorité des Flamands : ils connaissent les trois langues et ils te niquent grave ! Mais ils sont moins sympas que les Wallons. Moi, je voudrais que la Belgique rentre en France. On aurait tout à gagner. Vous aussi, grand peuple francophone…

Comme en 1945

1945 était certes une autre époque. Il y a, dans les lignes qui suivent, un romantisme identitaire dont on a peut-être quelque raison de se méfier aujourd’hui. Mais les questions liées à l’identité n’ont pas disparu du champ politique, loin de là, et il suffit que se profilent de nouvelles élections pour que la Belgique tremble à nouveau sur ses bases, rendues plus étroites par une succession de réformes allant toujours dans le même sens. Puisqu’en même temps, la France ne rayonne plus comme autrefois ; puisqu’on peut difficilement considérer l’Europe comme une patrie de substitution, du moins dans sa forme actuelle ; puisque la Wallonie ne s’est pas donné les moyens d’exister par elle-même, et que parler de Wallonie, c’est poser la question de ses liens avec la France ; puisque la dynamique du nationalisme flamand est plus forte que jamais, le discours de Charles Plisnier, celui qu’il a prononcé en octobre 1945 pour plaider la cause du rattachement de la Wallonie à la France, cette envolée de Charles Plisnier a peut-être encore une résonnance actuelle, et peut-être y a-t-il encore des Wallons pour sentir, dans leur chair, l’émotion qui a poussé l’assistance à entonner une vibrante Marseillaise une fois que ces paroles ont été prononcées :

« Ce sera aussi le résultat de ce Congrès d’avoir dit à la France que nous existions et que nous l’aimions, que nous l’aimions, non pas comme des étrangers qui aiment sa culture, son art, ses grands hommes, mais que nous l’aimerions quand même sans culture, sans art et peut-être même sans grands hommes, même si son éclat ne rayonnait pas sur le monde, parce que non seulement notre âme fait partie de son âme, mais aussi que notre corps est partie de son corps !

« Camarades wallons, nous aurons peut-être un jour besoin de la France, lorsque nous aurons fait cette expérience ultime qui nous est demandée, lorsque nous l’aurons faite dans un sacrifice à la raison et au sens des réalités politiques.

 « Lorsque nous aurons fait cette expérience ultime et si, comme je le crains, cette expérience avorte, alors – j’entends le dire aujourd’hui – nous serions justifiés à nous tourner vers la France et aucun reproche ne pourrait nous être adressé, car cette expérience, nous la ferons en toute loyauté et sans arrière-pensée d’aucune sorte.

« Alors, nous lui dirions : « Maintenant, France, au secours ! » et, croyez-le bien, elle viendra ! »

Le point sur les I

La stratégie des « 3 I + 2 » : une approche adaptée pour le mouvement réunioniste.

Par Cédric CHOPIN, Lille

Avant toute chose, il convient de poser un diagnostic implacable, hors duquel toute parole réunioniste est vouée à s’évaporer : la situation française actuelle constitue un repoussoir bien davantage qu’une espérance.

En vrac, je rappelle brièvement quelques éléments de contexte : déprime collective, poussées identitaires, centralisation et personnalisation extrême du pouvoir, emprise de l’espace médiatique national, atrophie de la société civile, mouvements sociaux marqués par des violences etc.

Je ne peux, hélas, que renvoyer à mon texte écrit le 14 juillet 2021, et publié sur le présent site en septembre de la même année : l’« ambiance générale » reste la même… (https://alliancewalloniefrance.blog/2021/09/01/reflexions-sur-letat-de-la-france/)

Triste constat, émanant du citoyen français que je suis, mais point de départ nécessaire pour une réflexion stratégique adaptée.

La Belgique, certes, n’est pas épargnée par ce malaise civilisationnel, mais l’organisation fédérale de l’État, le meilleur dynamisme de la société civile, l’identité locale mieux préservée, la force des corps intermédiaires (notamment syndicaux)… permet d’en diluer la violence.

Dès lors, comme dirait l’autre… que faire ?

La « mission » du mouvement réunioniste doit s’inscrire dans le cadre de ses moyens limités, ce qui heureusement permet tout de même d’agir concrètement.

Je n’évoquerai pas ici les actions à mener à l’intérieur de la Belgique.

De par sa nature, le réunionisme est principalement tourné vers la France, et doit affronter des obstacles qui se dressent face à lui.

Notamment les « 3 I », ainsi que la confusion entre deux autres « I ».

I comme ignorance.

Ne nous méprenons pas, la Belgique est pour la France une terra incognita… Bien sûr, il y a toujours des exceptions confirmant la règle : pour les régions frontalières, la Belgique – principalement francophone – fait partie de leur environnement. Les échanges anciens et permanents ont heureusement permis de créer une « culture de la frontière ».

Et puis il y a Bruxelles, la mieux connue des villes belges, et pas seulement grâce aux Français qui ont pu s’y installer pour des raisons fiscales.

Mais… c’est à peu près tout.

La visibilité des artistes belges, nombreux à faire en France une brillante carrière, ne doit pas faire illusion : ceci ne préjuge en rien d’une connaissance plus approfondie du pays qui les a vu naître. Au contraire ! Ces artistes pratiquant la langue de Molière, leur présence renforce l’idée reçue selon laquelle la Belgique est majoritairement francophone ! Car cette idée est toujours fortement ancrée dans l’inconscient collectif des Français (les régions frontalières faisant toujours exception).

Oui, je l’affirme, nous en sommes encore là !

Dès lors, les crises politiques touchant la Belgique apparaissent évidemment incompréhensibles…

Dans la mesure où ces crises sont connues… La vie politique, sociale et culturelle des autres pays frontaliers : Allemagne, Italie, Espagne (ou « équivalent » : Grande-Bretagne), est assez bien relayée par les médias français. La Belgique, en comparaison, ressemble à un trou noir d’où ne sort aucune information interne. La « petite taille » du pays (à relativiser : 11,6 millions d’habitants, ce n’est pas négligeable…) ne permet pas d’expliquer le phénomène.

Il y a bel et bien un problème de représentation, dont les racines historiques doivent être profondes, et dont l’origine est à rechercher des deux côtés de la frontière : si la France est globalement ignorante pour des raisons qui lui sont propres, la Belgique ne fait rien pour se faire connaître des Français (lesquels, de toute façon, « ne comprendraient rien »…).

I comme incrédulité.

En conséquence, quand bien même quelques Français se pencheraient sur la « question belge », qu’ils se heurteraient au discours officiel des différentes autorités… francophones cela va de soi… les questions seraient noyées dans des paroles lénifiantes sur le « modèle belge » de coexistence entre communautés, référence pour la construction européenne…

Des auteurs, des journalistes, des intellectuels… ressortiraient l’argument du « les gens sont unis, ce sont les politiques qui les divisent », sans jamais évoquer les « cercles » flamands (nationalistes, faut-il le rappeler) qui structurent la société civile du « nord du pays ».

Je résume et simplifie les choses : si l’on voulait développer, il faudrait plusieurs volumes… Mais ce constat n’est qu’une première étape. Au-delà du « belgicanisme » masquant le réel, un autre phénomène, purement français celui-là, se surajoute : même si l’on sait… on ne croit pas !

La connaissance des différents éléments de la « crise belge » – politiques, culturels, budgétaires etc. – ne débouche pas nécessairement sur de bonnes conclusions. Une espèce de biais cognitif se manifeste : la « dissonance » entre ce que l’on sait de la Belgique si l’on s’y intéresse, et les représentations que l’on en a, peut aboutir à une forme de déni.

Là aussi, les explications puisent leurs racines dans le temps long, et seule une étude historique académique pourrait en démêler les fils…

Les réunionistes ont beau présenter, même à des interlocuteurs choisis (de sensibilité souverainiste par exemple), la situation réelle « preuves à l’appui », ils n’ont souvent droit en retour qu’à des regards interrogatifs…

I comme indifférence.

Les sentiments s’enchaînent et se synthétisent de façon somme tout logique.

L’inextricable écheveau belge, qui pour être appréhendé demande un solide apprentissage, auquel s’ajoutent les différents « biais » de représentation : voilà au moins deux « bonnes raisons » de regarder ailleurs…

Pourquoi s’en faire ? Les réunionistes s’agitent, les partis flamands encore plus… quelle importance ? La Belgique étant le pays du folklore, il n’est pas surprenant que ce trait touche la sphère politique. Ne dit-on pas qu’en Belgique, « la situation est désespérée mais jamais grave » ?

Rien de nouveau sous le soleil, donc, pour continuer dans les proverbes.

De ce fait, pourquoi perdre du temps et de l’énergie à comprendre les affaires intérieures de ces sympathiques voisins, puisque tout finit toujours par s’arranger autour d’une frite accompagnée d’une bonne bière…

La Belgique, sujet géopolitique majeur, abritant les principales institutions européennes et l’OTAN ? C’est bien la preuve que le pays ne peut pas se disloquer, voyons !

Et puis, nous avons déjà tant de problèmes insolubles en France, on ne va tout de même pas ajouter ceux des Belges ! Chacun ses problèmes, et les vaches seront bien gardées… (encore un proverbe).

Mais au fait : de quel droit se mêlerait-on des affaires des autres ? Vous ne seriez pas amis avec un certain Vladimir ?

J’arrête ici le jeu de massacre… Ne nous faisons pas d’illusions : même caricaturées ici, voilà des positions que les réunionistes ont l’habitude d’entendre !

I comme ingérence, I comme intérêt : une confusion néfaste.

L’ingérence, voilà l’ennemi ! Et c’est d’ailleurs une vérité que nous partageons : toute ingérence véritable, c’est-à-dire toute action d’un autre État, ou d’un groupe de pression extérieur, visant à déstabiliser délibérément la Belgique, serait absolument inacceptable.

Le destin de la Belgique est entre les mains des Belges et d’eux seuls. Cela doit être répété autant de fois qu’il le faudra.

Mais l’intérêt est-il de l’ingérence ? Bien sûr que non !

Les reportages, documentaires… portant sur d’autres pays – nos voisin européens mais aussi des nations plus éloignées : Japon, États-Unis, Brésil… – sont-ils une marque d’ingérence ?

De même, l’inquiétude que peuvent susciter l’évolution théocratique de l’État d’Israël, ou la dérive identitaire du parti Républicain états-unien, serait-elle le signe d’un insupportable empiétement sur la liberté d’autrui ?

Les interrogations dubitatives de la presse allemande ou britannique, sur la formation et les méthodes de la police française, sont-elles par nature illégitimes ?

La droite nationale espagnole a manqué de peu d’entrer au gouvernement – du moins provisoirement. L’information a été largement commentée : s’agit-il d’une couverture médiatique excessive ?

Non, non et non ! Il est parfaitement normal de s’intéresser au monde qui nous entoure, qu’il soit proche ou lointain.

Mais alors : pourquoi la Belgique ferait-elle exception ? Pourquoi serait-ce le seul pays dont on n’aurait jamais aucune nouvelle intéressante ?

Sauf erreur, je n’ai jamais vu ou lu, sur une chaîne française ou un magazine, un reportage ou un article, expliquant réellement l’imprégnation nationaliste de la société flamande ! Rien par exemple sur les corporations étudiantes, dont l’influence s’étend bien après l’université, persistant dans le monde du travail, culturel ou politique.

Des bribes d’événements peuvent émerger çà et là, rarement, mais en étant systématiquement observés sous l’angle de la « grille de lecture belge », telle que décrite plus haut, et donc par là même « désamorcés » : de simples anecdotes relevant de la « couleur locale »…

Clairement : imaginons qu’un journaliste français fasse une enquête fouillée, sur le terrain, qu’il rencontre toutes les personnes possibles en lien avec le sujet traité, obtienne tous les documents nécessaires, et publie ses conclusions dans tel ouvrage, tel journal, tel reportage ou tel média en ligne ? Et que ses conclusions soient alarmantes, s’agissant de l’avenir budgétaire de la Wallonie, de celui des communes périphériques de Bruxelles, ou de la victoire culturelle du nationalisme en Flandre ? Dans les médias francophones « officiels », ou le monde politique, ce serait évidemment un tollé général, et l’accusation d’ingérence ne tarderait pas à surgir !

La confusion entre ingérence et intérêt légitime est un poison pour l’esprit, l’un des subterfuges plus ou moins conscients qui ont pour objet, ou pour effet, de détourner l’attention des Français – qui, de toute façon, « ne comprennent jamais rien… »

Les obstacles étant désormais identifiés et résumés sous une formule commode (« 3 I + 2 ») – et c’était là un préalable à toute action – reposons la question : que faire ?

Je me garderai bien de présenter ici un programme détaillé. Chacun, au demeurant, doit faire l’effort d’imaginer des solutions pour les verser au collectif.

Cependant, je propose quelques pistes.

* La « stratégie des 5 mots en I », si vous me permettez ce raccourci, permet d’élaborer des éléments de langage qui pourront contourner les blocages, et ainsi faciliter la prise de contact avec des interlocuteurs choisis.

* Les contacts doivent être en effet précisément « ciblés ». Pour ma part, j’estime qu’une méthode visant à « arroser » un groupe particulier (ex. : les parlementaires), dans l’espoir de recevoir quelques réponses, n’est pas très productive.

* Soyons modestes : dans un premier temps, il est presque impossible qu’une personnalité française de premier plan (politique, journaliste, essayiste) prenne position sur la question belge. Ce n’est pas tout de suite que la Belgique aura droit à son émission « C dans l’air », sur France 5…

Les « seconds couteaux » et autres « médias alternatifs » doivent être « priorisés ».

* La prise de contact serait facilitée par l’utilisation d’un « support » : un tract, un fascicule, voire un livre – cette dernière solution serait bien entendu la meilleure !

* Parmi les « médias alternatifs » qu’il serait possible de contacter, on peut retenir :

– le site d’information en ligne Elucid (https://elucid.media), où officient des auteurs de sensibilité souverainiste, comme Eric JUILLOT (https://elucid.media/author/ejuillot/)

– Médiapart (https://www.mediapart.fr), dont on peut critiquer le fort parti pris idéologique, mais qui a le mérite d’être totalement indépendant, financé uniquement par ses abonnements, et axé sur l’investigation. La rédaction pourrait être intéressée par l’influence de l’extrême droite au sein de la société flamande, dès l’université… et par la progression du PTB côté wallon…

– la rédaction de la revue Front Populaire (https://frontpopulaire.fr), dont l’évolution sur certains points est discutable (quelques intervenants sont, disons-le, « marqués » à l’extrême droite), mais dont le souverainisme est la marque de fabrique.

– la nébuleuse souverainiste s’est également regroupée autour d’une association, née d’un événement tragique : le décès prématuré de l’essayiste Coralie DELAUME  (https://fr.wikipedia.org/wiki/Coralie_Delaume). Elle était proche notamment de Natacha POLONY,de l’hebdomadaire Marianne. Ses amis et sa famille ont créé Les Amis de Coralie Delaume (https://www.facebook.com/Amisdecoraliedelaume/), afin de poursuivre son œuvre de réflexion.

Les participants sont autant d’interlocuteurs possibles. Parmi ces derniers se trouve David Desgouilles, journaliste et chroniqueur justement à Marianne. Vu le niveau où se situait Coralie DELAUME, l’existence d’un livre ou tout au moins d’une documentation solide semble être un nécessaire préalable avant toute prise de contact.

Les pistes ici ébauchées n’incluent pas le monde académique, ni les milieux politiques. Ces derniers ne sont évidemment pas à exclure. Je n’ai pas non plus évoqué la presse locale des régions frontalières, dont il ne faut pas négliger l’importance.

Et si des sympathisants réunionistes sont en lien avec des personnalités appartenant à d’autres cercles, des deux côtés de la frontière, qu’ils n’hésitent pas à les solliciter !

Ceci n’est pas un lion

Projection, en présence du réalisateur Jean-Pierre Roy, du documentaire politique sur le rêve d’indépendance de la Flandre, CECI N’EST PAS UN LION. C’est le vendredi 2 juin à 20h à la Salle des Écuries de Watermael-Boitsfort (1170 – Place Gilson 3).

« Ceci n’est pas un lion » a été jugé « remarquable » par le journaliste Christophe Deborsu (RTL), « sensationnel » par feue Antoinette Spaak et « caustique, passionnant, vulgarisé » par le critique de cinéma David Hainaut. Selon le journaliste wallon Thomas Leodet, ce long-métrage « propose un excellent état des lieux et amène à la réflexion sur un sujet épineux ».

Le trou noir de la gestion wallonne

Par Paul MELOT

Je réagis à un article de l’Echo de ce 20 avril.

André ANTOINE est plus que « généreux » avec la Région wallonne dans ses prévisions en parlant pour elle d’austérité future. Il devrait plutôt parler, tant pour la Région wallonne, que pour la Communauté française, que pour les communes, d’une véritable FAILLITE programmée : augmentation de la dette = augmentation des intérêts accompagnée de l’inflation + dépenses énormes inévitables pour le climat… Les caisses de pension pour les agents communaux sont déjà vides : outre ce qui a déjà été décidé, d’autres décisions de sauvetage devront être prises. Les inévitables augmentations (énormes) d’impôts communaux, régionaux, fédéraux vont suivre APRES LES ECHEANCES ELECTORALES de 2024. TOUS les partis sont muets relativement à ce qu’il faut faire pour éviter ces multiples faillites et la population semble ignorer ou feint d’ignorer ce qui est programmé. Ils sont d’autant plus muets qu’ils savent ce qu’il convient de faire mais ne veulent ni le faire, encore moins le faire savoir !!! Le doute s’amplifiera, la colère montera, les extrêmes fourbiront leurs « armes » et les défis de la démocratie se multiplieront alors que les partis nous diront « qu’on ne savait pas, qu’on n’avait pas prévu », etc.

Pendant ce temps, diverses révélations supplémentaires (pensions des anciens présidents de la Chambre, pensions des députés, qu’en est-il des sénateurs ?) minent encore un peu plus la confiance populaire dans les autorités. En WALLONIE, il n’y a pas encore eu de décision en la matière (alors qu’au fédéral et en Flandre, c’est le cas…).

Au fédéral, la presse nous apprend que, pour les députés, le plafonnement des pensions de 75% (Loi Wijninckx) à 80.262,49 euros/brut/an peut être percé jusqu’à 120%, soit un supplément illégal de 1562 euros/brut/MOIS dont PROFITENT au moins 49 députés actuellement (on sait : 49 sur 600, en réalité bien avantage !). Certes, « ils » ont décidé de supprimer cette disposition mais on ne sait rien d’une récupération : 49 X 1562 X 156 mois = 11.939.928 euros à récupérer… au minimum. La décision en catimini a été prise un an après le vote de la Loi Wijninckx, preuve de son illégalité, quand, pour le reste de la population, 75% c’est 75% et pas plus !

Enfin, pas de décision sur ce qui suit : quand les députés, toujours en catimini (« on » ne retrouve pas le P.-V. de la décision, c’est énorme !), ont décidé via LEUR ASBL qui gère LEURS pensions, de bafouer la Loi qu’ils ont EUX-MEMES votée (!), ils n’ont rien décidé, maintenant, en matière de récupération des sommes volées, et encore moins de supprimer cette ASBL, contrairement à toute la fonction publique gérée par le SPF Pensions. (Evidemment, cette ASBL est « gérée » et donne inévitablement lieu à des indemnités ou traitements. Peut-on croire que ces indemnités sont déclarées ? Sait-on qui en bénéficie ?)  Si la pension était gérée par le SPF, les sommes seraient non seulement contrôlées, mais en plus empêchées d’être dépensées.

L’article joint se montre donc encore bien optimiste.

Il y a peu de temps, je parlais avec une personnalité de Charleroi – qui m’avait gentiment et courtoisement manifesté une grande écoute – et qui m’interrogeait à propos du désintérêt des jeunes pour l’action politique (exemple pour le PS : perte de presque la moitié de son électorat wallon en une trentaine d’années ET perte simultanée de la MOITIE de ses affiliés et militants dans le même laps de temps : il existe bien une grande corrélation entre les deux). Eh bien, tout ce qui précède lui donne, notamment, une grande partie de la réponse à sa question, et pas seulement pour les jeunes. Modestie et humilité doivent être le mot d’ordre de notre personnel politique, surtout pour éviter et contrer la montée du poujadisme qu’il engendre (PTB y compris, pour ceux à qui cela fera plaisir !)

A 76 ans, alors que j’ai quitté « mon » parti il y a déjà 16 ans, libre de toute attache, personne n’a pu me faire la démonstration de ce qui aurait été une erreur ! Bien au contraire, avec quarante ans d’activité politique, j’ai acquis le DROIT de dénoncer leurs manquements graves, ce dont je ne me prive pas !

Le tram, une spécialité liégeoise

Par Pierre MELOT

Bonjour à tous et à toutes,

Ni une épouse acariâtre et violente, ni une bagarre au sortir d’un tripot ne sont responsables d’une gueule aussi amochée et recousue, la mienne. Simplement, une chute dans les chaussées et les trottoirs éventrés de notre ville, principalement pour l’installation d’une unique ligne de tramway (tant attendue et qui tarde à sortir des chantiers) est à l’origine de cette « défiguration ».

A l’occasion de cet accident, n’hésitons pas à évoquer un point d’histoire un peu ancienne des transports en commun liégeois, qu’il ne faut pas prendre pour de la nostalgie de ma part : il s’agit clairement de regret et de dépit, assortis d’une saine colère citoyenne ! Expliquons-nous. Du temps de ma lointaine jeunesse, il y avait à Liège – ÉCOUTEZ BIEN, LES JEUNES – 9, je dis bien neuf ! lignes de tram (dont certaines escaladaient allègrement les collines entourant la cuvette du centre-ville – et qu’il aurait fallu, bien sûr, moderniser) + une bonne vingtaine de lignes de trolleybus (eux aussi électriques, pour rappel à la jeune génération qui n’a pas connu de genre de véhicules).

Quelle dégringolade depuis les années septante du 20e siècle ! Jusqu’à cette époque, les transports en commun urbains liégeois étaient quasiment tous électriques (sauf certaines lignes de la société nationale SNCV dont les autobus – fonctionnant au gasoil – desservaient surtout la périphérie plus lointaine.) Des pionniers… et des visionnaires, nos ancêtres du siècle dernier ! Résultat : en ces temps lointains mais déjà formidablement développés, pas (ou peu) de pollution urbaine en provenance des transports en commun, donc pas (ou peu) de nuisances sanitaires et climatiques devenues tellement pesantes de nos jours…

De plus, la plupart de ces véhicules et installations étaient fabriqués et assemblés en Wallonie, terre d’industrie par excellence, rappelons-le : éléments mécaniques (châssis, organes de transmission et de suspension, roues, carrosseries, etc.) à la FN de Herstal; éléments électriques (moteurs, transformateurs, caténaires, etc.) aux ACEC de Charleroi; et même les pneus, qui étaient fabriqués à Liège (de marque Englebert, devenue Uniroyal).

Quelle a été l’évolution des transports publics urbains depuis la « condamnation à mort » de nos tramways et trolleybus électriques… pourtant bien en avance sur leur temps ? Découlant d’options politiques, urbanistiques et techniques différentes et à coups d’importantes subventions des pouvoirs publics, les quatre autres grandes villes de Belgique – Bruxelles (17 lignes de tram, 4 lignes de métro), Anvers (13 lignes de tram), Charleroi (4 lignes de tram/métro), Gand (3 lignes de tram) ont pu maintenir et développer leurs réseaux de tramways – tant mieux pour elles ! -, tandis que Liège (arrondissement-métropole de 600 000 habitants) a dû se contenter pendant des décennies et jusqu’à aujourd’hui d’un parc d’autobus exclusivement diesel (fatalement polluants) relevant d’un quasi-monopole des marques « nationales » Vanhool (Lierre, province d’Anvers) et Jonckheere (Roulers, Flandre occidentale), très lentement élargi à d’autres marques ces toutes dernières années. Pourquoi une telle différence, un tel retard en défaveur de l’agglomération liégeoise ? Vues courtes et choix inopportuns des mandataires politiques, urbanistes et décideurs industriels liégeois de ces années-là ? Influence déterminante des lobbys belgo-flamands vigilants et alléchés par un très gros marché de longue durée ? Conjugaison de ces deux explications ? Allez savoir, ou (pour certains) refuser de savoir…

Pour y voir clair, qu’on se renseigne sur cette problématique, par exemple au « Musée des Transports en commun de Wallonie » établi à Liège. Visite très recommandée ! (*) Lire encart ci-dessous. Et qu’on ne manque pas de s’intéresser aussi à ce qui existe en matière de transports publics urbains sur rails dans les villes de taille équivalente (et même de moindre importance) chez nos voisins français, allemands, hollandais, et même dans le petit grand-duché (à Luxembourg : 1 ligne de tram existante, bientôt 4). Comparaison qui risque fort d’être douloureuse pour les Liégeois…

Elle n’est pas belle et équitable la Belgique chérie aveuglément par les Wallons ? Concitoyens wallons, n’ayez ni peur ni honte. Sur tous les sujets d’importance qui nous concernent : enquêtez, creusez et exprimez-vous !

Pierre Mélot (qui a le souci de ses petits-enfants)

(*) Une surprise très interpelante attend, dès l’entrée du musée, ceux d’entre vous qui auront la curiosité d’aller le visiter (rue Richard Heintz 9, 4020 Liège, quartier des Vennes – bus 4 à partir du centre-ville… et non plus tram 4 hélas disparu ! Sauf au musée).

Alors que l’entreprise FN (Fabrique Nationale, de Herstal) a été l’un des fleurons des constructeurs wallons de véhicules de transports publics (cf. photo d’un puissant trolleybus FN des années 1950 à 1971), c’est l’entreprise flamande Jonkheere (eh oui !) qui accueille les visiteurs dans le hall d’entrée de ce « Musée des Transports en commun de… Wallonie ». Un comble ! Et ce sous la forme d’une assez fidèle reconstitution (à un détail près) de l’avant d’un autobus de cette marque trônant sur la face avant du comptoir d’accueil… (cf. photo)

Questions : l’élégant emblème ailé – et arborant sobrement les deux lettres  » FN  » – qui figure à la proue de ces fabuleux trolleybus (voir photo) a-t-il été jugé moins représentatif, moins prestigieux pour accueillir les visiteurs dès leurs premiers pas dans le musée ? Sommes-nous là en présence d’une étourderie impardonnable de la part de la direction ? D’une complaisance voire d’une connivence avec un constructeur flamand aux arguments sonnants et trébuchants… en échange d’une bonne dose de visibilité pour cette marque en terre wallonne ? On vous laisse deviner. En tout cas, le coup publicitaire (voulu ou non) est parfaitement réussi : Jonckheere, la marque qui compte en Wallonie ! Pourquoi en douterait-on… puisque le musée « officiel » de Wallonie met ostensiblement et préférentiellement ce constructeur au premier plan ?

Hommage à Jean-Maurice Dehousse

A la demande de plusieurs de nos sympathisants, nous reproduisons ici le discours prononcé ce 18 février par Philippe Destatte à la mairie de Liège, en hommage à Jean-Maurice Dehousse décédé 9 jours plus tôt à l’âge de 86 ans.

Mon cher Jean-Maurice ,

Tu honores ce drapeau wallon qui te couvre.

C’est pour t’entendre parler de droit constitutionnel que je t’ai rencontré pour la première fois, le 5 octobre 1981. Qui en serait surpris ?  La conférence portait sur un artifice, une entourloupe : tu te demandais comment activer l’article 17 ancien de la Constitution belge pour transférer, sans révision, l’exercice de l’enseignement, alors encore national, vers la Communauté française.

Proche de France Truffaut depuis quelques années, j’avais l’impression de bien te connaître tant elle vantait tes mérite. J’avais déjà voté pour toi aux élections législatives du 17 décembre 1978, même si – ton parti me le pardonnera -, j’avais parallèlement coché la case de François Perin au Sénat. J’y trouvais une belle cohérence.

Fondation André Renard, Club Bastin-Yerna, Grand Liège, Institut Destrée, Club “Rencontres” avec Jean Mottard, Fondation Bologne-Lemaire : les lieux où nous croiser n’allaient pas manquer. Même pour moi qui me considérais comme un Spitaels’ boy, puisque c’est l’attraction intellectuelle du professeur de sociologie qui m’avait fait adhérer au Parti socialiste quand il en est devenu président en mars 1981.

Tout semblait aller pour le mieux dans le meilleur des mondes.

Oui, je sais, Jean-Maurice. Et je t’entends : “Philippe tu es un enfant“. Premier ministre de Wallonie, tu t’inscrivais sur une trajectoire personnelle qui endossait la pensée fédéraliste de Jules Destrée, celle de Georges Truffaut et surtout celle de Fernand Dehousse, de Jean Rey. Tu pratiquais aussi le volontarisme de hussard de ces “extrémistes du possible”, ces autres renardistes : Freddy Terwagne, J-J Merlot et aussi André Cools. De ce dernier tu me confiais en 1992 : André Cools m’a tout appris en politique. En particulier la cruauté.

Au-delà de l’affirmation du fédéralisme et des réformes de structure, ce qui frappe le plus chez toi, le premier des ministres-présidents de la Wallonie, que tu étais et que tu resteras, c’est assurément ton gaullisme. Je l’entends au sens d’une volonté nationale de dépasser les clivages politiques pour rechercher un intérêt commun. Et je ne dis pas commun par distraction à la place de “intérêt régional”. Même si tu accordais la primauté à la Wallonie, cher Jean-Maurice, tu n’étais ni le premier ni le dernier des régionalistes. D’ailleurs, tu n’étais pas régionaliste au sens où la presse l’entend aujourd’hui : celui qui voudrait transférer toutes les compétences communautaires aux Régions. Contrairement à ton “ami” Jean Gol – à qui tu aimais tant faire des farces -, tu ne voulais pas non plus l’absorption des Régions par la Communauté. Tu es resté fidèle aux travaux du Congrès des Socialistes wallons tenu à Ans en 1991 sous la présidence de Robert Collignon, comme tu avais été fidèle à celui de Verviers de 1967. Ainsi, tu as été le premier artisan de ces transferts lors de la réforme de la Constitution de 1993, en les permettant par la création de l’article 138 de la Constitution. De même, par l’autonomie constitutive et l’élection directe du Parlement de Wallonie, tu as voulu renforcer la Région.

Aujourd’hui, beaucoup semblent avoir oublié que vous étiez alors, ton homologue flamand Louis Tobback et toi, les ministres des Réformes institutionnelles dans le Gouvernement de Jean-Luc Dehaene. Nous travaillions avec un attelage surprenant de spécialistes : le jeune Christophe Legast, juriste que nous avait recommandé Jacky Morael, Jacques Brassinne de La Buissière et Pierre Joly, mon plus proche collaborateur, détaché de la Cour des Comptes. En interaction bien sûr avec Philippe Busquin et Marc Foccroulle. Et sous le regard toujours aiguisé et alerte de Jean-Marie Roberti, gardien du phare renardiste.

Au service de la Wallonie, tu restais néanmoins fondamentalement attaché à la Communauté française dont tu as été un grand ministre de la Culture. Et tu n’appelais pas à sa disparition.

Je t’entends bien, cher Jean-Maurice, me dire, jusqu’il y a peu : Philippe, “là-dessus, nous n’avons jamais été d’accord. Nous ne serons jamais d’accord“.

En effet.

Il n’empêche que, plus que quiconque, tu as su baliser l’avenir de la Wallonie. Sans jamais que ton discours ne signifie repli mais, au contraire, s’inscrive constamment, par intelligence stratégique plus que par curiosité, dans les géopolitiques et les géoéconomies de l’Europe et du monde.

Certes, casquette de prolétaire sur la tête, écharpe rouge autour du cou, dans les brumes de Val Duchesse, toi, Jean-Maurice, le Renardiste, tu faisais de l’anticapitalisme et tu restais, autant que faire se peut, connecté à l’Interrégionale wallonne de la FGTB et à ton ami de toujours, Urbain Destrée. C’est pourtant toi, le même Jean-Maurice, qui répétait en leitmotiv cette formule que rappelle si souvent ton ancien collaborateur Philippe Suinen : sans profit, pas d’entreprise, sans entreprise pas d’emploi.

Mais c’est François Perin qui t’inspirait lorsque, ministre-président, tu affirmais les six principes qui, selon toi, devaient déterminer l’avenir de la Wallonie. Je te cite :

La Wallonie n’appartient à aucun groupe politique. Pas même au Parti socialiste. Nul ne peut prétendre à ce monopole. Sinon tout dialogue devient impossible.

La Wallonie, ce n’est pas un bassin : la volonté d’union doit prédominer.

La Wallonie, ce n’est pas un secteur industriel. Tous les secteurs, depuis la sidérurgie jusqu’à l’agriculture, sont en situation de combat.

Il faut en Wallonie un accord sur le concept de la soli­darité sociale.

La Wallonie est une adhésion, et une adhésion libre. Un territoire [ou] une population, doit pouvoir décider d’y entrer ou d’en sortir. Librement.

Bruxelles, partant du principe précédent, ne peut être “annexée”. La Région bruxelloise forme une entité spéci­fique, qui doit pouvoir décider de son destin. Mais il faut une solidarité Wallonie-Bruxelles. Pour l’organiser, il faut un dialogue, qui viendra, disais-tu, tôt ou tard. Et il s’agit de s’y préparer.

Anticiper ce dialogue intrafrancophone. Nul doute que tu l’as fait.

D’ailleurs, en 1993, te préparant à une interpellation difficile – c’était au Restaurant La Presse, près de la Chambre – tu me rappelais que tu avais beaucoup appris des Bruxellois. En particulier de ce cher François Persoons qui, disais-tu – n’avait pas son pareil pour choisir un bon vin. De ton côté, Jean-Maurice, tu m’as dit avoir enseigné à ton homologue de la Culture qu’il fallait respecter certaines règles pour maintenir une bonne relation entre francophones de Bruxelles et Wallons de Wallonie.

Les accords Dehousse-Persoons sont bien loin. Mais ils nous rappellent ce principe élémentaire, aujourd’hui oublié.

Mon cher Jean-Maurice,

Le drapeau wallon, marqué de la date de 1912, et que tu tiens de ta grand-maman, est aujourd’hui bien à sa place.

Ce drapeau trouve son origine dans le fait que, le 7 juillet 1912, un juriste, député et militant wallon, comme toi, est venu ici même, à Liège pour participer au Congrès organisé par la Ligue wallonne.

Comme tu l’as si souvent fait, face à des congressistes un peu animés, un peu indécis et un peu brouillons, ce député a rédigé, porté, défendu une courte résolution et l’a fait voter par le congrès. Ce petit texte appelait à l’indépendance de la Wallonie vis-à-vis du pouvoir central ainsi qu’à la création d’une Commission composée d’un membre par quarante mille habitants, à l’instar de la Chambre des Représentants.

Sa résolution votée, ce juriste, député et militant wallon, comme toi, a porté sur les fonts baptismaux l’Assemblée wallonne, premier Parlement de Wallonie, créé le 20 octobre 1912.

Ce député s’appelait Jules Destrée. Avec ses amis, dans ce Parlement fantôme, ils ont façonné ce drapeau qui te couvre aujourd’hui et symbolise, encore et toujours, notre forte autonomie.

Toi, Jean-Maurice, tu t’es placé sur ces traces fédéralistes. Aujourd’hui, c’est toi qui honores ce drapeau.

Car, tu aimais à le rappeler, ce sont les Parlements qui fondent la démocratie et qui structurent l’État.

Merci, mon cher Jean-Maurice, pour toutes ces leçons d’intelligence, de résistance, et d’amitié.

Philippe Destatte

Situation alarmante pour les écoliers de Wallonie

Par Pierre MELOT

On ne rigole plus : le rouleau compresseur belgo-flamand resserre son emprise.

  Une sombre météo linguistique risque de s’abattre à terme sur les écoliers wallons. Dernière « idée » de la ministre de l’Éducation de la Fédération Wallonie-Bruxelles (approuvée par l’Exécutif mais non encore validée par le Parlement) : imposeret non plus proposerle cours de néerlandais dès la 3e année des écoles primaires de Wallonie (comme c’est le cas actuellement dans la Région bilingue français/néerlandais de Bruxelles et dans les communes dites « à facilités » de la frontière linguistique).

  Nuance, s’il vous plait ! Rappelons au passage – on a une furieuse tendance à l’oublier du côté de Bruxelles – que la Wallonie est, elle aussi, une Région bilingue… mais français/allemand, mille tonnerres ! Pourquoi, diable !, jeter un tel désordre dans l’ordonnancement institutionnel si délicat voulu par la Constitution ?

Une « idée » idéale ? À voir…

   En introduisant précocement, exclusivement et obligatoirement le cours de néerlandais dans la formation des tout jeunes écoliers wallons, l’objectif poursuivi par la ministre vise-t-il sans arrière-pensée ( ??? ) à les doter d’un bagage linguistique à la fois large, utile et enthousiasmant ? Trois critères indissociables à prendre en compte dans l’apprentissage d’une langue étrangère quelle qu’elle soit.

   Un bagage linguistique large. Jugez vous-mêmes de la pertinence (ou de l’indigence) de l’« idée » ministérielle, centrée sur le petit territoire belge. Dans le monde entier (8 milliards d’êtres humains), le néerlandais est la langue maternelle de quelque 24,5 millions de personnes, nous avons bien dit 24,5 millions (17,5 millions de Néerlandais, 6,5 millions de Belges flamands et environ 500 000 personnes dispersées en Amérique du sud et en Asie + quelque 500 000 autres à titre de langue seconde), soit 0,31 % de la population mondiale… Non seulement c’est très, très peu sur le plan numérique mais c’est surtout ridiculement peu en termes de diffusion sur les cinq continents.

   Par contre, ce qui fait de l’anglais (plus exactement de l’anglo-américain) la langue étrangère à connaitre par priorité, c’est le nombre de locuteurs qui le pratiquent au quotidien (1,3 milliard comme langue maternelle ou langue seconde) et surtout sa diffusion incomparable sur l’ensemble de la Planète. Ces deux atouts confèrent à l’anglais la première place parmi les langues parlées, écrites, lues et étudiées dans le monde. Une espèce de passeport universel pour son détenteur. Même les Chinois, pourtant les plus nombreux sur Terre, sont obligés d’y avoir recours pour communiquer avec les autres Terriens. Convenons-en : entre l’anglais et le néerlandais, la palme du bagage linguistique « large » revient sans le moindre doute à l’anglais.

   Un bagage linguistique utile. Certes le néerlandais peut être utile dans le cas particulier de la recherche d’un emploi à Bruxelles. L’obtenir est une chose, espérer une promotion intéressante en est une autre car la concurrence flamande est rude et vigilante. Rappelons – c’est ainsi en Belgique – que le Flamand est toujours réputé meilleur bilingue que le Wallon. Et que, pour des raisons historiques et géolinguistiques, il l’est effectivement souvent. Il n’y a qu’à écouter nos ministres, nos députés néerlandophones et francophones… et comparer. Mis à part ce point, il faut bien reconnaitre que la connaissance du néerlandais est d’une faible, voire très faible utilité en Wallonie. Et que dire dans le monde…

   En revanche, l’anglais s’impose de plus en plus dans notre quotidien, au nord et au sud et surtout à Bruxelles : voyages (tourisme, affaires, études), échanges scolaires et étudiants (programme européen Erasmus), finances et assurances, commerce, science et recherche, technologie (informatique, aviation, espace), chemins de fer, armée, marine marchande, culture, médias et communication, ONG, lobbys internationaux, politique (Parlement européen, OTAN), diplomatie… La liste est longue des domaines dans lesquels la connaissance de l’anglais tient lieu de véritable passeport mondial… et belge. Oui, oui ! En Belgique aussi, où de plus en plus d’entreprises, de services publics, d’ONG (des deux côtés de la frontière linguistique) passent à l’anglais pour leurs activités transrégionales, leurs formations, leurs colloques. À tel point que l’époque où chacun parlait sa langue en étant suffisamment compris par le partenaire allophone est pratiquement révolue : « Please go on in English ! » Et que dire des universités, francophones comme néerlandophones, qui dispensent carrément leurs cours uniquement en anglais ! Somme toute, comme le couteau suisse qui vient à votre secours dans toutes les situations, l’anglais, par sa polyvalence, vous tirera d’embarras aux quatre coins du monde.

   Un bagage linguistique enthousiasmant.Ne perdons pas de vue que les premiers concernés par cette « idée » ministérielle sont les jeunes Wallons du 21e siècle de plus en plus interconnectés, entre eux et aux réseaux mondiaux (en anglais). Leur motivation pour une langue plutôt qu’une autre est un élément capital du succès et du rendement de ce cours. Selon l’option choisie (anglais ou néerlandais), que sera ce cours pour les écoliers wallons ? Un plaisir ou un boulet ?

   Demandons-leur. Voici ce que répondent, dans leur redoutable franchise (sondages à l’appui), la majorité des écoliers wallons qui ont suivi le cours de néerlandais en 5e et 6e primaires (souvent imposé par le pouvoir organisateur) : « Nous n’aimons pas cette langue. Elle est laide (sic). Personne d’autre que les Flamands ne la parle. On a été forcés de l’apprendre. On aurait préféré l’anglais. En accord avec nos parents, nous avons choisi l’anglais pour le secondaire. » On le voit : pour bon nombre d’écoliers wallons – informés et plus matures qu’on ne le pense –, la cause est entendue : bien qu’ils aient suivi (subi ?) le cours de néerlandais à partir de la 5e primaire, il n’y aura pas (ou peu) de continuation. Ce sera l’anglais dès la 1re année du secondaire !

   La place nous manque dans le cadre de cette « causerie » pour analyser – arguments scientifiques à l’appui – l’aversion affective, esthétique et géolinguistique tranchée des écoliers wallons pour le néerlandais. Contentons-nous, en tant qu’ancien professeur de néerlandais, de faire remarquer qu’on ne peut pas leur donner entièrement tort …

Surprise et effroi dans certains cercles

   Dans le camp du pouvoir politico-linguistico-économique belgo-flamand, panique à bord : « Catastrophe ! s’y écrie-t-on. Le choix du cours de néerlandais dans les écoles de Wallonie s’effondre ! La Belgique, notre Belgique va s’écrouler. Et le pouvoir nous échapper… Il faut réagir. Vite et fort. Les Wallons doivent rentrer dans le rang. Coûte que coûte. Donnons à nos relais politiques wallons l’ordre de « s’en occuper » ! » La réaction n’a pas tardé. Dans le parti de la ministre de l’Éducation, l’injonction est tombée : « Au boulot, camarade ministre ! Un décret rectificateur, et fissa ! » En bon petit soldat, la ministre a sorti illico une décision conforme aux volontés des instances de son parti : un projet très élaboré de reprise en main des consciences wallonnes par le canal des cours de langues. Un écueil de taille, hélas pour elle !, a surgi en travers de sa route : la dure réalité ! Pas assez de « bras pédagogiques » sur le marché pour faire exécuter les ordres jupitériens. Bien avant les écoliers, les enseignants se sont détournés du néerlandais, qui cesse d’être compris à quelques lieues de Bruxelles. Que peut la ministre face à cette pénurie ? Reporter, à regret sans doute, l’application de la mesure à l’année scolaire 2027-28, dans l’espoir d’un hypothétique afflux de jeunes recrues moins néerlandophobes. Au besoin en traficotant la législation sur les titres requis, solution déjà dans les cartons. Voire en formant des professeurs en accéléré, au rabais…

D’autres risques à craindre ?

  Oh, que oui ! Manifestement, l’étau belgo-flamand se resserre autour des citoyens wallons. Déjà les mâchoires décrétales se rapprochent dangereusement de nos jeunes écoliers. Devinons-nous le piège du même ordre déjà programmé pour imposer le néerlandais à nos ados dans le secondaire ? À ce régime, quid de leur niveau de connaissances en anglais, indispensables dans l’enseignement supérieur ? Où un très grand nombre de cours ne sont plus dispensés et publiés qu’en anglais. Où la compétition internationale fait rage sur le plan des publications… en anglais.

Adresse aux élus, sous l’œil vigilant du peuple wallon

   Attention ! Le but de cette « causerie » n’est pas de « tuer » le cours de néerlandais dans les écoles de Wallonie. Il s’agit seulement et clairement de dénoncer avec force le projet d’instauration du cours de néerlandais obligatoire à partir de la 3e année primaire, et ce pour cinq raisons (au moins) :

1. cette disposition est liberticide car elle porte atteinte au libre choix des parents ;

2. cette disposition va à l’encontre du sentiment majoritaire wallon qui élève l’anglais, dans les consciences et dans les faits, au rang de langue étrangère prioritaire ;

3. à ce stade, c’est l’école primaire qui est visée : la possibilité de choisir le cours d’anglais y disparait : une erreur monumentale à court, à moyen et à long terme ;

4. il est plus que probable que la ministre (et son gouvernement) aient le projet d’étendre cette disposition à l’enseignement secondaire. Dans ce cas, l’anglais y serait autorisé mais uniquement à titre de langue étrangère seconde : l’erreur devient faute ;

5. plus grave encore, le néerlandais sera la langue étrangère unique pour les élèves du secondaire qui, dans leur cursus scolaire (partiel ou mouvementé), n’auront pas eu l’occasion de choisir une seconde langue étrangère (en l’occurrence l’anglais). Un cycle secondaire sans l’anglais dans son CV scolaire au 21e siècle, est-ce sérieux ?

   Mesdames et Messieurs les élus, la Belgique des 19e et 20e siècles n’est plus. Malgré cela, la dernière « idée » ministérielle frappe par son côté passéiste, retardataire, étriqué. Si vous persistez dans cette voie qui entend maintenir les enfants wallons dans les sentiers d’avant-hier, que seront-ils d’autres, une fois adultes, à Londres, New York ou Sydney, en Afrique ou en Asie, que de tristes handicapés linguistiques ? Cela vous importe-t-il qu’ils ne le soient pas ? Prouvez-le !

Adresse aux parents conscients et responsables

   Parents wallons, ouvrez les yeux ! Maintenant ! Des forces partisanes sont en train de vous leurrer dans les grandes largeurs. Pour très longtemps si vous n’y prenez pas garde maintenant. Leurs arguments servent d’autres intérêts que les vôtres. Majoritairement de l’autre côté de la frontière linguistique. Vers où certains partis veulent vous entrainer, en commençant par vos enfants. Ne vous laissez pas distraire de votre ligne : l’avenir de vos enfants. Qui ont le droit de vivre des jours heureux, des cours heureux à l’école. De s’y épanouir dans des formations porteuses d’avenir. Et non de se « racrapoter » sur une Belgique du passé, une Belgique qui se disloque. Pour eux et avec eux, continuez à penser « monde » ! Offrez-leur, pour toute leur vie, le meilleur outil de communication internationale qui soit : l’anglais enseigné et pratiqué le plus tôt possible : la « lingua franca » d’aujourd’hui et de demain. Ai-je tout dit ? Probablement pas, mais vous en savez assez. À vous d’agir. Maintenant !

Pierre MÉLOT

ancien professeur de néerlandais et d’allemand

ancien traducteur juré

pierre.ed.melot@gmail.com     

Le Monde au chevet de la Wallonie

Par Paul MELOT

Le journal Le Monde a publié, ce 15 novembre, un article au titre interpellant : Pour la Wallonie, l’électrochoc du risque de faillite.

N’étant pas abonné, je n’ai pas pu lire l’intégralité de l’article mais j’en devine le contenu. Ce qu’il faut retenir, c’est avant tout le fait que LE MONDE s’interroge sur le devenir de la Wallonie, donc nécessairement sur la viabilité d’une région voisine… et francophone.

Cela m’inspire trois commentaires. Au risque de me répéter, je voudrais pointer ceci :

 1) La gestion catastrophique du gouvernement wallon, du gouvernement Di Rupo et des gouvernements précédents, qui ont rendu la Wallonie exsangue au même niveau que la Grèce de 2008, AVANT les premières aides européennes. L’article du Monde rappelle le constat de Bart DE WEVER (évidemment !) MAIS cela ne doit pas faire oublier que, dès 2011, le Professeur GAZON, chiffres à l’appui (jamais contestés depuis et même corroborés par le CERPE, Université de Namur, … en Wallonie, donc !), informait l’opinion wallonne – tellement endormie – de l’état catastrophique de nos finances et d’une réelle possibilité de faillite de la Wallonie.

2) La réaction politique de Di Rupo, soucieux de réduire à rien le communiqué de BELFIUS s’inquiétant de la probable montée du PTB au vu de l’impossibilité de redressement de la Wallonie par les partis traditionnels (on a le droit de penser que le PTB ferait mieux que ceux qui ont gouverné jusqu’à maintenant mais il n’est pas certain que ce soit le sens du communiqué de Belfius). Notons aussi les réactions du même Di Rupo aux propos tenus par J.-L. Crucke qui, tout libéral social qu’il soit, n’a quand même rien d’un communiste !

3) Tout cela avec, de surcroît, les perspectives sombres d’une faillite de la Communauté française (perspectives elles aussi annoncées et un peu dévoilées, du bout des lèvres, par Daerden jr., ministre des Finances de la CF), précédant celle, presque inéluctable, de la Wallonie. Il n’y a en effet aucun lien structurel entre l’Etat fédéral et les communautés, donc, en cas de faillite, ce sont les régions de Bruxelles (francophone) et la Wallonie qui devront banquer pour sortir la Communauté française (FWB) de l’ornière financière.

A la lecture de ce qui précède, on peut donc comprendre ce qu’un article d’un journal étranger (d’un important journal français) peut susciter en réactions chez Di Rupo et d’autres, quand la presse francophone belge – puissamment aidée par les aides publiques – informe timidement ou pas du tout des risques énormes pesant sur l’avenir de la Wallonie.

La Wallonie avec la France en Europe et dans le monde